« Enfin! », « prématuré » : la classe politique française s’est divisée jeudi sur l’annonce par Emmanuel Macron que la France pourrait reconnaître « en juin » un État palestinien.
Le chef de l’Etat a déclaré mercredi que cette reconnaissance pourrait avoir lieu à l’occasion d’une conférence qu’elle coprésidera avec l’Arabie saoudite aux Nations-unies à New York et qui doit aussi conduire, selon lui, à la reconnaissance d’Israël par un certain nombre de pays.
Si cette reconnaissance « vient dans un cadre qui permet à des pays qui ne reconnaissent pas Israël de le faire et à d’autres pays qui ne reconnaissent pas la Palestine ou l’État palestinien de le faire, c’est un bon processus », a estimé sur RTL l’ancien président socialiste François Hollande.
Il a néanmoins rappelé que « ce qui compte, c’est bien sûr qu’un jour il puisse y avoir un État palestinien, mais que le Hamas ne soit pas dans cet État palestinien et que Gaza puisse être une zone où les Gazaouis puissent vivre, tout simplement ».
« Enfin. Après près de deux ans de génocide à Gaza, la France envisage enfin de reconnaître l’État de Palestine », a tweeté de son côté la cheffe des députés LFI Mathilde Panot, rappelant que « 147 pays l’ont déjà fait » et réclamant que « ce geste, arraché de haute lutte » se traduise « en acte ».
Pour le premier secrétaire du PS, Olivier Faure, interrogé sur franceinfo, l’annonce d’Emmanuel Macron représente un moyen de « faire pression » sur « un gouvernement d’extrême droite qui a fait la démonstration depuis de longs mois de son inhumanité et, depuis le 18 mars, qui a rompu cessez-le-feu avec des conséquences dramatiques ».
– « Conditions pas réunies » –
Favorable également, la présidente de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet (Renaissance) a souhaité sur France Inter « avancer sur cette solution à deux États », mais avec « des garanties de sécurité pour les deux États ».
La « clause de réciprocité » prévoit que « les parties se reconnaissent mutuellement: les Palestiniens ont droit à un État, les Israéliens ont droit à un État, les deux ont le droit de vivre en sécurité dans un régime démocratique », a jugé le président des députés MoDem, Marc Fesneau sur TF1, y voyant une « bonne idée ».
La solution à deux États reste rejetée par le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu. Mais les appels en ce sens se sont intensifiés depuis le début de la guerre à Gaza, déclenchée par l’attaque du mouvement islamiste palestinien Hamas sur Israël le 7 octobre 2023.
« Je veux aussi participer à une dynamique collective, qui doit permettre à tous ceux qui défendent la Palestine de reconnaître à leur tour Israël, ce que plusieurs d’entre eux ne font pas », a expliqué Emmanuel Macron mercredi sur France 5.
En 2020, les accords d’Abraham ont mené à la reconnaissance d’Israël par les Émirats arabes unis, Bahreïn, le Soudan et le Maroc. L’Arabie saoudite en revanche a suspendu ses négociations pour un rapprochement avec Israël depuis le début de la guerre à Gaza, conditionnant toute reconnaissance à la création d’un État palestinien.
Pour le vice-président du Rassemblement national, Sébastien Chenu, toute reconnaissance serait « prématurée ». Si le parti d’extrême droite est « favorable à deux États », l’État palestinien est aujourd’hui « adossé au Hamas » – une organisation qualifiée de terroriste par les États-Unis, l’Union européenne et Israël notamment -, a-t-il développé sur LCI. « C’est envoyer un signal: +faites du terrorisme et on vous reconnaîtra des droits », a-t-il balayé.
Position partagée par le président LR du Sénat Gérard Larcher. « Nous avons toujours des otages dans la bande de Gaza, nous avons toujours des attaques du Hamas, nous avons malheureusement une Autorité palestinienne extrêmement faible », a-t-il argumenté sur Europe1/Cnews. « Est-ce que les conditions sont réunies pour que nous allions plus loin dans la reconnaissance indispensable à terme de la réalité d’un État de Palestine? Non », a-t-il tranché.
Le plan défendu mercredi par Emmanuel Macron met de facto à l’écart le mouvement islamiste palestinien et prévoit un retour de l’Autorité palestinienne, chassée du territoire en 2007 par le Hamas.