Kankan, 19 avr. (AGP)- L’affaire remonte au mois de février dernier, lorsque Bintou Mara, une fillette de 7 ans, a été admise au service d’urologie de l’hôpital régional de Kankan, accompagnée de ses parents venus de Mandiana. Son état était alarmant : ventre distendu et paralysie des membres inférieurs. Une intervention chirurgicale urgente était nécessaire, mais les coûts étaient « excessifs » pour sa famille.
Le Directeur de l’hôpital, Dr Fremba Camara, avait pris la décision de prendre en charge les frais médicaux de l’enfant. Les médecins ont réussi l’opération, affirmant qu’elle avait été un succès complet. Bintou a retrouvé l’usage de ses jambes, et ses parents ont reçu des instructions pour un suivi médical, avec un rendez-vous fixé.
Mais la situation a pris une tournure préoccupante. Bintou a développé de nouvelles complications et a été admise à nouveau au service de pédiatrie. Fodé Mara, père de la fille, déclare que l’opération a échoué et accuse les médecins d’avoir négligé le suivi de sa fille. Selon lui, les médecins lui avaient garanti que l’opération serait couronnée de succès.
« J’ai envoyé mon enfant à l’hôpital de Kankan pour son traitement. On m’avait dit qu’elle pourrait être traitée ici. Le médecin qui a fait l’opération ne m’a pas dit que ça pouvait échouer. L’intervention est finie, mais ça ne va toujours pas, et j’ai fini de tout dépenser. Le Directeur de l’hôpital m’a même aidé dans les dépenses. Après l’intervention, nous avons passé quelques jours à l’hôpital, puis on nous a autorisés à repartir à Mandiana et revenir le 13 avril 2025. C’était pendant le mois de Ramadan. Avant même le 13 avril, nous sommes revenus, mais le médecin dit qu’il ne touche plus à l’enfant. Il dit que nous n’avons pas respecté les consignes, alors qu’il avait bien dit qu’il pouvait faire le travail. L’intervention n’a pas réussi, et maintenant il refuse de s’occuper de l’enfant. Moi, je suis là, je n’ai absolument rien », a-t-il expliqué.
En réponse à ces accusations, Dr Fremba Camara a tenu à clarifier la situation lors d’une conférence de presse. Il a expliqué que les parents avaient été informés de la nécessité d’un suivi en cancérologie à Conakry, ce qu’ils n’ont pas fait.
« La raison pour laquelle je vous appelle ce matin concerne le parent d’un enfant qui est en train de se promener dans les médias et administrations de Kankan. Je suis profondément écœuré par ce comportement. L’enfant est arrivé ici très affaibli, avec un ventre ballonné. Les parents n’avaient pas les moyens. L’information m’a été transmise, et le cas nécessitait une intervention chirurgicale. Certains ont proposé de ne pas la toucher et de l’envoyer directement à Conakry, mais le médecin traitant m’a dit : “S’ils n’ont pas pu payer ici, ce n’est pas à Conakry qu’ils le pourront.” Et le déplacement, est-ce qu’ils pouvaient l’assurer ? C’est ainsi que j’ai demandé à ce qu’on me fasse le titre de créance et qu’on me l’envoie. Ils l’ont fait. Les examens de laboratoire et cliniques ont été réalisés. J’ai demandé s’ils pouvaient opérer, on m’a dit oui, mais sous condition : qu’après l’intervention, ils partent à Conakry pour le suivi. J’ai dit d’accord, on prend les dispositions, on l’opère. Le papa a même promis au médecin qu’il vendrait ses bœufs au village pour partir à Conakry. L’intervention a eu lieu, il est venu me remercier, et moi aussi j’ai remercié mon équipe. Après leur sortie, ils n’ont pas respecté les consignes données. J’ai donc demandé au surveillant d’appeler les parents pour savoir où ils étaient. J’avais même préparé une équipe pour aller voir l’enfant. Deux jours après, le médecin m’a dit qu’ils ont fait un traitement à Mandiana, qu’ils ont même injecté l’enfant, et qu’elle est redevenue paralysée. Quand le père est revenu, il a d’abord nié, puis il a reconnu les faits. Je lui ai dit que j’étais désolé. Mais quand je vois qu’il est en train de salir l’hôpital dans les médias, je me dis qu’il faut répondre. Sinon, cette intervention aurait coûté pas moins de 40.000.000 GNF. Pourquoi j’invite la presse ? Parce qu’il est en train de mentir sur l’hôpital. Demandez-lui combien il a payé pour le traitement de son enfant », a-t-il déclaré.
Le Dr Arafan Moussa Fofona, l’un des médecins ayant opéré Bintou, a également exprimé son étonnement face aux accusations.
« L’intervention a été un grand succès pour nous. La cicatrisation a été rapide, nous avons retiré la tumeur. Nous suspectons un cancer, et c’est pour cela que nous avons demandé qu’elle poursuive le traitement dans un service de cancérologie à Conakry. L’enfant ne marchait pas, mais après l’opération, elle a retrouvé l’usage de ses jambes. Deux mois après, ils m’ont appelé pour dire que l’enfant avait de la fièvre, qu’elle avait le paludisme. Je leur ai dit : “Tu n’es pas docteur, comment sais-tu que c’est le palu ?” Je leur ai ordonné d’aller à l’hôpital préfectoral de Mandiana, mais ils ne l’ont pas fait. Je ne sais pas où ils ont amené l’enfant. Ensuite, son état s’est aggravé. Depuis leur retour, je suis à leurs côtés pour les soins. Mais j’ai été surpris d’être interpellé par un média disant que nous refusons de soigner l’enfant. J’étais même en train de chercher une institution pour la prise en charge. Mais aujourd’hui, nous sommes limités dans la prise en charge : il faut maintenant un service de cancérologie à Conakry », explique cet autre médecin.
AGP/19/04/025 MKK/CM/AND